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Le Vingtième Siècle

tenir ça de sa maman ; la pauvre dame n’a sans doute pas beaucoup d’agrément avec son savant de mari ; j’ai entendu vaguement parler de bisbilles de ménage… Évidemment, avec ses phonographes, c’est cet ours de mari qui avait tous les torts.

— C’est tout ? dit le phonographe ; c’est très bien, j’ai enregistré…

— Ah ! mon Dieu ! s’écria Mme Lacombe soudain effrayée, il a enregistré ; Qu’ai-je fait ?… Je n’y pensais pas, il parlait, mais en même temps il enregistrait ! Ce phonographe va répéter ce que j’ai dit ! C’est une trahison !… Mon Dieu, que faire ? Comment effacer ? Oh ! l’abominable machine ! Comment la tromper ?… Aoh ! je volais vous dire… Je suis une dame anglaise, mistress Arabella Hogson, de Birmingham, venue pour apporter un témoignage d’admiration à l’illustre Philox Lorris… »

Mme Lacombe fouilla fébrilement dans le petit sac qu’elle tenait à la main, elle en tira une tapisserie de pantoufles qu’elle venait d’acheter pour M. Lacombe et la déposa sur le phonographe.


« ah ! mon dieu !… il a mon portrait maintenant ! ».

« Tenez, c’est une paire de pantoufles que j’ai brodées moi-même pour le grand homme… Vous n’oublierez pas mon nom, mistress… Ah ! mon Dieu, fit-elle, en voilà bien d’une autre, il y a un petit objectif au phono, le visiteur est photographié ! Il a mon portrait maintenant… Tant pis, je me sauve ! »

Elle se dirigea vers la porte, mais elle revint vite.

« J’allais mettre le comble à mon impolitesse, partir sans prendre congé ; que penserait-on de moi ?… Heureuse et fière d’avoir eu un instant de conversation avec l’illustre Philox Lorris, malgré les interruptions d’une dame anglaise très ennuyeuse, son humble servante met toutes ses civilités aux pieds du grand homme ! prononça-t-elle en se penchant vers le phonographe.