Page:Robida - Le vingtième siècle, 1883.djvu/150

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table peinture de l’existence de Jupille, poursuivi dès son enfance par le malheur et conduit au crime par l’obstination de sa tante à lui faire attendre un héritage qui lui revenait de plein droit. Elle parla des quatre ou cinq enfants de Jupille et prouva, toujours d’après les notes de Mlle Malicorne, que si Jupille les avait abandonnés, comme le ministère public le lui avait reproché, c’était précisément par suite de la délicatesse de sa fibre paternelle, c’était pour ne pas les voir souffrir des privations qu’il n’était pas en son pouvoir de leur épargner.

PORTRAITS DE JUPILLE ESQUISSÉS À L’AUDIENCE PAR UN DESSINATEUR SENSIBLE. (Avant la plaidoirie. - Après la plaidoirie.)
PORTRAITS DE JUPILLE ESQUISSÉS À L’AUDIENCE PAR UN DESSINATEUR SENSIBLE. (Avant la plaidoirie. - Après la plaidoirie.)

Quelques jurés commencèrent à donner des signes d’émotion.

« Vous êtes des pères de famille appelés à juger un père de famille, reprit Hélène en suivant ses notes, écoutez donc et jugez de la situation de l’infortuné Jupille à la veille de son accès de brutalité ! »

Et, feuilletant son dossier, essayant chacun des effets indiqués par l’éminente Mlle Malicorne, Hélène parla pendant une heure, frappant du poing sur la barre quand Mlle Malicorne le lui disait et s’attendrissant aux passages émouvants, lorsque la grande oratrice lui poussait le coude pour lui recommander de mettre quelques sanglots dans sa voix.

L’affreux criminel était devenu le pauvre Jupille, le malheureux Jupille, l’infortuné Jupille ! L’auditoire, prévenu d’abord contre lui, le considérait avec commisération : quelques dames pleuraient franchement dans leurs mouchoirs et les dessinateurs des journaux judiciaires le Crime illustré et la Revue des assises, qui d’abord avaient dans leurs croquis donné à