Page:Rodenbach - L’Élite, 1899.djvu/23

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seul les mal clairvoyants ont pu juger licencieuse, a la façon dont Moïse énumère, dans le Lévitique, certaines abominations. Son œuvre est un examen de conscience de l’humanité présente.

Lui-même, certes, est un pécheur ; il le confesse et avec componction. Il se contemple dans sa faute comme en un miroir brisé et s’y pleure.

Car son œuvre n’est pas seulement objective, elle est subjective aussi ; et c’est ce qui la rend si pathétique : le poète confondu avec cette foule, marchant parmi cette foule en proie au péché, apparaissant tout couvert de son péché, en même temps que du péché des autres.

Partout la théorie catholique de la perversité originelle. Mais partout aussi la détestation des vices. Il les poursuit, il les dénonce à travers l’énorme capitale, ce fiévreux Paris qui est l’atmosphère chaude à merveille pour leur pullulement.

Ainsi, occasionnellement, il apparaît un poète parisien (on connaît la série de poèmes intitulés : Tableaux parisiens) après déjà Sainte-Beuve qui ne voyait dans la ville pécheresse que motifs de pittoresque et de mélancolie.

Baudelaire, lui, ausculte les passants, déchire leurs linges d’hypocrisie, découvre en eux des ulcères mentaux, des résidus de méchanceté, et aussi une flore de vices nouveaux, et tout le vin