Page:Rodenbach - La Mer élégante, 1881.djvu/23

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d’allaiter. Je l’avais entrevue sur nos plages du midi ; je la reconnais. Vous l’avez rencontrée sur vos rivages du nord. Elle vous a inspiré déjà beaucoup de beaux vers, je ne veux pas dire seulement de vers bien faits ; (à l’heure qu’il est, il faut vouloir pour arriver à ne pas les faire trop bien !)

Le grand apaisement du soir descend dans l’âme
Et là-bas, où le ciel se mêle avec les eaux,
Resplendit le soleil comme une île de flamme.


Mais je relève ceux-ci pour leur signification féconde :

Ô mon pays de Flandre aux beaux soleils couchants,
Je t’aime avec l’amour qu’un fils porte à sa mère !


Voilà indiquées en deux citations, mon cher ami, les deux sources de l’inspiration : la grande lumière éternelle, universelle, qui éclaire toutes les patries, d’où viennent toutes les existences, toutes les idées, tous les sentiments ; et le pays qu’on aime, où l’on vit, que l’on connaît mieux que personne, qui a ses lumières, ses ombres, ses caractères propres, ses secrets livrés seulement à qui l’aime tout enfant.


Vous songez à offrir à la Belgique un livre qui lui raconte sa poésie locale. Faites cela, nous vous en prions. Osez beaucoup en étant simple. Soyez sincère et laissez dire. Soyez original par votre pays ; il vous en sera reconnaissant, il vous aimera plus encore ; vous l’aurez vraiment servi. Tirez du