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LA VIE DES CHAMBRES.

Or me cherchant moi-même en cette analogie
J’ai passé cette fin de journée à m’aigrir
Par le spectacle vain et la psychologie
Douloureuse des fleurs pâles qui vont mourir.
Triste vase : hôpital, froide alcôve de verre
Qu’un peu de vent, par la fenêtre ouverte, aère
Mais qui les fait mourir plus vite, en spasmes doux,
Les pauvres fleurs, dans l’eau vaine, qui sont phtisiques,
Répandant, comme en de brusques accès de toux,
Leurs corolles sur les tapis mélancoliques.
Douceur ! Mourir ainsi sans heurts, comme on s’endort,
Car les fleurs ne sont pas tristes devant la mort,
Et disparaître avec ce calme crépuscule
Qui d’un jaune rayon à peine s’acidule.