Page:Rodenbach - Les Vies encloses, 1896.djvu/100

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Mains des fermes vendangeant les grappes du lait ;
Mains des berceaux dépliant leurs roses trémières ;
Et les mains des couvents en qui le chapelet
Est un silencieux écheveau de prières ;

Toutes les mains s’évertuant vers des bonheurs,
Mains mystiques, mains guerrières, si variées :
Les mains, couleur de la lune, des mariées ;
Les mains, couleur de grand soleil, des moissonneurs ;

Toutes : celles semant du grain ou des idées ;
Accouchant le bloc de marbre, de la statue,
Ou la mère, de l’enfant qui la perpétue ;
Toutes les mains, jeunes, vieilles, lisses, ridées,

Toutes ont pour tourment caché ces lignes fines,
Ces méandres de plis, cet enchevêtrement ;
Or on dirait des cicatrices de racines,
Nos racines que nous portons, secrètement.