Page:Rodenbach - Les Vies encloses, 1896.djvu/194

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XIX

Le sommeil met aux yeux un tain spirituel
Grâce auquel leurs miroirs exigus se prolongent
Par delà la mémoire et le temps actuel.
Ils voient plus loin et mieux, tandis qu’on croit qu’ils songent
Et tout l’Univers joue en ces glaces sans fond.
Ah ! les pauvres regards, si nus durant la veille !
Dans les yeux endormis, un beau cygne appareille ;
Et ces ombres soudain que des nuages font !
C’est un bonheur en fuite, un malheur qui s’avance ;
L’automne s’y mélange à des roses d’enfance ;
On se voit mort, tandis qu’on se revoit amant ;
Ce n’est plus le présent seulement qu’on reflète ;