Page:Rodenbach - Les Vies encloses, 1896.djvu/214

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Elle s’étend dans l’atmosphère spongieuse
Et, grise, elle renaît d’elle-même sans fin.
Pluie étrange. Est-ce un filet où l’âme se mouille
Et se débat ? Est-ce de la poussière d’eau ?
Ou l’effilochement fil à fil d’un rideau ?
Est-ce le chanvre impalpable d’une quenouille ?
Ou bien le ciel a-t-il lui-même des douleurs
Et pleut-il simplement les jours que le ciel pleure ?
Alors tout s’élucide : attraction des pleurs !
La pluie apporte en nous les tristesses de l’heure ;
Insinuante, jusqu’en nous elle descend ;
Elle cherche nos pleurs et va les accroissant,
Ô pluie alimentant le réservoir des larmes !
Inexorable pluie ! Apporteuse d’alarmes !
Nous n’en souffrons si fort que pour prévoir un peu
Qu’après la pluie et les heures sombres enfuies,
Même lorsque le ciel sera de nouveau bleu,
Il nous faudra plus tard pleurer toutes ces pluies.