Page:Rodenbach - Les Vies encloses, 1896.djvu/86

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La main règne, d’un air impérieux, car tout
Ne s’accomplit que par elle, tout dépend d’elle ;
Pour le nid du bonheur, elle est une hirondelle ;
Et, pour le vin de joie, elle est le raisin d’août.

La main rit d’être blanche et rose, et qu’elle éclaire
Comme un phare, et qu’elle ait une odeur de sachet ;
C’est comme si toujours elle s’endimanchait
À voir les bagues d’or dont se vêt l’annulaire.

Or pendant que la main s’enorgueillit ainsi
D’être belle, et de se convaincre qu’elle embaume,
Les plis mystérieux s’aggravent dans la paume
Et vont commencer d’être un écheveau transi.

Vain orgueil, jeu coquet de la main pavanée
Qui rit de ses bijoux, des ongles fins, des fards ;
Cependant qu’en dessous, avec des fils épars,
La Mort tisse déjà sa toile d’araignée.