bouche était entrouverte d’une façon merveilleuse ; elle eût fait récrier d’admiration Chardin et Boucher. Son masque lui avait été enlevé sans qu’elle le sût…
En ce moment la pendule rocaille de la salle à manger sonna trois heures.
— Je commence à croire, chevalier, dit tout bas M. de Genlis à de Vannes, que cette poudre pourrait bien être perfide.
— Nullement, cher comte ; voyez plutôt ces joues auxquelles la pourpre revient, ces lèvres que le rose vient colorer, est-ce là un fantôme ? et toutes les courtisanes qui nous entourent n’envient-elles pas ce visage ?
— Pour moi, dit M. de Durfort, je consens à reprendre ma peau d’ours si ce n’est point une fille de qualité.
— Moi, messieurs, je gage que c’est une comédienne de province, dit le comte de Lauraguais.
— Tu es partial pour les comédiennes, Lauraguais, dit le duc ; tu aimes Sophie Arnoult !
— Ce qu’il y a de sûr, c’est qu’elle n’est point de l’Opéra, dit une des impures du souper. Nous ne la connaissons pas !
— Que le premier flacon de vin de Tokai soit vidé à sa santé, s’écria le duc de Chartres ; elle s’éveillera doucement au choc des verres !
Ma foi, monsieur Gachard, reprit-il, vous avez là du vin qui doit vous faire des amis !
Le Gachard sourit et fit signe aux laquais de redoubler les rasades.