Page:Rojas - Lavigne - La Celestine.djvu/127

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plaindrait volontiers de ce qu’on lui fait dire tout le contraire de ce qu’elle voudrait bien. Mais afin que vous soyez calme et vous teniez en repos pendant que je vous raconterai au long ma démarche et le prétexte que j’ai trouvé pour entrer, sachez que la fin de tout cela a été des meilleures.

Calixte. Maintenant, amie, que tu m’as donné la force de supporter toute la rigueur de ses réponses, dis ce que tu voudras et comme il te plaira ; je serai attentif. Mon cœur se repose, mes pensées se calment, mes veines reprennent le sang qu’elles avaient perdu, je n’ai plus de crainte, je suis joyeux. Montons, si tu veux, tu me diras en détail, dans ma chambre, ce que tu ne m’as dit ici que sommairement.

Célestine. Montons, seigneur.

Parmeno, à part. Ô sainte Vierge ! que ce fou cherche de détours pour nous éviter, pour pouvoir pleurer de joie tout à son aise avec Célestine, pour lui découvrir tous ses secrets, tous ses désirs extravagants et impudiques, pour demander et redire six fois la même chose, sans qu’il y ait là quelqu’un qui puisse lui reprocher d’être long ! Mais, sois tranquille, insensé, nous te suivons.

Calixte. Vois donc, ma bonne, ce que peut dire Parmeno. Comme il se signe en apprenant que tu as agi avec tant de promptitude ! Il en est épouvanté, sur ma foi, car il se signe de nouveau. Monte, monte, et assieds-toi, mère, car je veux écouter à tes genoux les suaves nouvelles que tu m’apportes. (Dans la chambre.) Dis-moi bien vite : comment as-tu fait pour entrer chez Mélibée ?

Célestine. J’y suis allée vendre un peu de fil, c’est ainsi que j’en ai pourchassé plus de trente en ce monde, à la volonté de Dieu, et quelques-unes même plus haut placées.

Calixte. Par le corps, sans doute, mère, mais non par la gentillesse, non par l’état, non par la grâce et