Page:Rojas - Lavigne - La Celestine.djvu/128

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’esprit, non par la naissance, non par la vertu ni par le doux langage.

Parmeno, en bas. Le voilà qui enfile des paroles, l’étourdi ; voilà ses niaiseries qui se déroulent, il est comme l’horloge à midi, il n’en dit pas moins de douze à la fois. Compte, compte, Sempronio, me voilà tout abasourdi de les entendre, lui disant des folies, elle débitant des mensonges.

Sempronio, en bas. Ô méchante vipère ! pourquoi fermes-tu les oreilles à ce qui les fait ouvrir à tout le monde, serpent qui fuis la voix de l’enchanteur ! Pour cela seulement que ces paroles sont paroles d’amour, quoique mensonges, tu devrais les écouter avec attention et avidité.

Célestine. Écoutez, seigneur Calixte, et vous verrez ce qu’ont fait votre bonne étoile et ma sollicitude. Lorsque je commençais à vendre et à faire marchander mon fil, la mère de Mélibée fut appelée pour aller visiter sa sœur, qui est malade, et comme elle ne pouvait s’en dispenser, elle laissa Mélibée à sa place pour continuer le marché.

Calixte. Ô joie sans égale ! ô singulière opportunité ! ô hasard favorable ! Que j’aurais été heureux d’être caché sous ta mante pour entendre parler celle en qui Dieu a réuni des grâces si remarquables !

Célestine. Sous ma mante, vous dites ? Le ciel vous en préserve, vous seriez vu par trente trous et plus. Dieu veuille l’améliorer !

Parmeno, en bas. Sempronio, je m’en vais, je ne dis plus rien, écoute à ton aise. Si mon pauvre maître n’était pas là tout absorbé à calculer le nombre de pas qu’il y a d’ici à la maison de Mélibée, à penser à sa beauté et à deviner de quelle manière elle était posée en marchandant ce fil et ce qu’elle pensait alors, il reconnaîtrait que mes conseils étaient plus salutaires que toutes ces faussetés de Célestine.

Calixte. Qu’est-ce que cela, amis ? J’écoute ici avec