Page:Rojas - Lavigne - La Celestine.djvu/180

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menaient ces jeunes filles ; il me semble presque que j’y suis en ce moment. Le but de ma venue, bonne mère, puisqu’il faut que tu le saches, est de te demander la ceinture. De plus, ma maîtresse te prie d’aller la voir sans aucun retard, parce qu’elle se sent très-fatiguée de faiblesses et de douleurs de cœur.

Célestine. Ma fille, de semblables petites maladies font plus de bruit que de mal. Je suis étonnée qu’une personne aussi jeune souffre déjà du cœur.

Lucrèce, à part. Le démon t’emporte, traîtresse, comme tu ne sais pas ce que c’est ! La vieille fait ses coups, s’en va, et puis fait l’ignorante.

Célestine. Que dis-tu, ma fille ?

Lucrèce. Mère, hâtons-nous et donne-moi le cordon.

Célestine. Partons, je l’ai sur moi.




ACTE DIXIÈME


Argument : Pendant que Célestine et Lucrèce sont en chemin, Mélibée parle toute seule. Elles arrivent à la porte. Lucrèce entre la première et fait entrer Célestine. Après quelques causeries, Mélibée découvre à Célestine qu’elle éprouve un grand amour pour Calixte. Elles voient venir Alisa, mère de Mélibée, et se séparent aussitôt. Alisa demande à sa fille ce que venait faire Célestine et lui défend de la voir trop souvent.


MÉLIBÉE, CÉLESTINE, LUCRÈCE, ALISA.

Mélibée, seule. Malheureuse et imprudente que je suis ! n’aurais-je pas mieux fait d’accorder hier à Célestine ce qu’elle me demandait quand elle vint me prier au nom de ce seigneur (dont la vue m’a captivée) ? N’aurais-je pas mieux fait de le satisfaire et, par ce moyen, de me guérir moi-même, plutôt que d’être