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Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/1105

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de munitions pour suivre le siège de Carpentras ; cette ville se défend vigoureusement, et l’aristocratie qui l’a prise pour son foyer s’y maintient avec succès. Vous connaissez l’état de l’Europe et l’éveil qui tient en armes toutes ses puissances. Il est prouvé aujourd’hui, pour le plus grand nombre des personnes instruites, que le départ de Louis XVI, le 18 précédent, était pour la frontière. La petite année Condée (sic) est aujourd’hui de dix mille hommes ; beaucoup de ci-devant parlent de divers lieux de la France, pour s’y réunir. Tout cela ne serait que risible si nous avions une bonne Assemblée ; je ne sais plus quand elle cédera la place à l’autre législature, et je crois que les plus sages sont ceux qui avouent que le calcul des événements futurs est devenu presque impossible. Seulement il est clair que cette génération est vouée aux troubles, et que ce serait tant pis pour elle s’il en était autrement ; car ce n’est plus que dans le choc et le hasard des passions et des choses qu’on peut espérer d’obtenir quelque résultat favorable au grand nombre. Je soupire après mon ermitage et le bonheur d’y faire quelque bien dans le silence : j’en ai assez de Paris ; il était beau à voir au moment de la Révolution, il m’afflige aujourd’hui et je le quitterai sans regrets. Les affaires de Lyon ne vont ni vite ni mieux que les autres ; mais comme elles occuperaient extrêmement mon mari s’il était actuellement à Lyon même, je me console de le voir ici, où elles lui laissent quelque relâche ; c’est ainsi qu’il y a compensation à tout.

Adieu, nous sommes toujours vos bons amis.


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M. H. BANCAL, [À LONDRES[1].]
22 mai 1791, — de Paris.

Qu’êtes-vous donc devenu ? nous n’entendons plus parler de vous et ne savons qu’en penser.

Vous étiez bien aise, disiez-vous, de nous savoir à Paris, parce que ce rapprochement rendrait la correspondance plus facile et plus fréquente ; mais votre dernière date déjà de plus d’un mois, malgré les lettres que nous vous avons adressées dans cet intervalle. Je me rappelle d’un temps où de semblables

  1. Lettres à Bancal, p.227 ; — ms. 9534, fol. 119-122. — En marge, de la main de Bancal « Rép. le 27 »