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AVERTISSEMENT.

contente m’occupe singulièrement… » il termine en annonçant qu’il ira la chercher le 21.

Ici, la correspondance s’interrompt pour plusieurs mois ; Madame Roland est installée à Amiens et son mari ne la quitte guère que pour de courtes tournées de service. Du 15 février au 15 novembre, nous n’avons que deux lettres (21 mai et 25 juillet).

Nous avons rassemblé, dans l’Appendice E, tous les renseignements qui peuvent faire connaître le milieu d’Amiens où la jeune femme se trouvait transportée. Bornons-nous donc ici à quelques traits essentiels : peu de relations avec les autorités de la province et de la ville ; Roland vivait en termes assez froids avec l’intendant, M. d’Agay, et en hostilité presque constante avec les officiers municipaux, c’est-à-dire avec la haute bourgeoise amiénoise. Mais sa femme retrouvait là ses amies, Henriette et Sophie Cannet ; lui, de son côté, avait à Amiens des parents. Mme  de Chuignes, qu’il appelle sa tante (sans que nous ayons pu établir le lien), Mme  Decourt, et d’autres vieilles dames, qui, dans les lettres, sont appelées « les mères », « les bonnes mères », les « grands-parents ». Mais il y avait surtout des amis personnels, M. de Bray de Flesselles, avocat du Roi au Bureau des finances ; M. d’Eu de Perthes, directeur général des fermes « pour les traites, les gabelles et le tabac », grand amateur de livres, botaniste passionné ; M. Devins des Ervilles, receveur général des fermes pour les traites et gabelles, l’attentif honnête et discret de Mme  d’Eu ; M. d’Hervillez, médecin de l’Hôpital militaire, membre de l’Académie d’Amiens, professeur d’un cours public de chimie. Puis des manufacturiers, des fabricants, Flesselles, Delamorlière, qui s’intéressaient aux travaux de Roland et à ses luttes contre les marchands, les négociants, maîtres de la municipalité, et maîtres jaloux. La plupart de ces noms reviendront bien souvent dans la Correspondance.

La maison préparée par Roland pour sa femme, en face du logis de M. d’Eu, était sise rue du Collège et attenante au cloître Saint-Denis, qui servait alors de cimetière (voir Appendice E).

C’est là que Madame Roland passa plus de trois années, de février 1781 à août 1784, sortant peu, tout entière « à son ménage et à son herbier », s’occupant de son petit jardin, allant herboriser avec son mari et M. d’Eu dans les fossés du rempart, suivant les offices par bienséance à l’église du Collège, voisine de son logis, et entretenant avec Roland, quand il était en tournées ou retenu à Paris par ses affaires, une correspondance presque quotidienne.