Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/1219

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nité[1]. Il n’est nullement doux de perdre 5,000 livres de revenu, après quarante années de services, sans le plus petit dédommagement[2]. Il n’est pas possible qu’il n’y en ait point, mais il ne faut pas négliger de le solliciter, car dans ce monde on n’obtient justice qu’en faisant valoir ses droits. Je voudrais bien que nous ne fussions pas si éloignés de la capitale.

Dans l’espèce d’incertitude qu’apporte cet événement à notre situation, nous ne saurions, pour l’instant, songer au projet en question. Mais connaîtriez-vous, en Dauphiné, autour de Lyon, quelque bien national qui ne soit pas en vigne[3] et que l’on puisse affermer, de la valeur d’environ 40, 000 francs ?

Si vous découvrez très promptement quelque chose de semblable, hâtez-vous d’en avoir des renseignements détaillés et veuillez nous en faire part. Ne sauriez-vous point si les biens de l’abbaye de Savigny, en ci-devant Lyonnais, sont actuellement vendus[4] ?

Ne vous étonnez pas, et soyez indulgent sur mon mauvais caractère d’écriture ; je finis ma lettre avec le jour, je ne vois point ce que je trace, mais nos sentiments n’en sont pas altérés, et je vous réitère, pour nous deux à vous deux, un attachement inviolable.

Recevez nos embrassements.

    directeurs généraux du commerce et des manufactures sont révoquées… ».

  1. Madame Roland se trompait en ce point. L’article 4 du décret du 27 septembre stipulait « des retraites ou secours à celle des personnes supprimées qui en sont susceptibles par la nature et la durée de leurs services, etc… Or Roland établit, dans un mémoire de décembre 1791, publié par M. de Girardot (Les Ministres de République française, Roland et Madame Roland ; Paris, Guillaumin, 1860, p. 7-9), qu’il était alors dans sa trente-huitième année de services.
  2. Exactement 5,600 francs, dont 5,000 francs de traitement fixe et 600 francs d’indemnité de logement (Girardot, pièce citée). Un pamphlétaire qui a connu et calomnié les Roland, l’abbé Guillon de Mauléon (Mémoires, p. 57), dit huit mille livres, et M. Granier de Cassagnac, qui copie l’abbé Guillon sans y regarder, reproduit ce chiffre. ( Les Girondins et les massacres de Septembre, t. I, p. 182.)
  3. « Pour rien, je ne veux de vignes », écrivait Roland à Bancal, le 6 septembre précédent. — « Un bien que l’on puisse affermer » ne veut par dire un bien que Roland prendrait à ferme, mais au contraire un bien qu’il achèterait pour le donner à bail à un fermier.
  4. Voir lettre du 13 octobre 1790.