Je reçois ta lettre, mon bon ami, et elle me trouve occupée d’un petit discours que Preverd[2] m’a priée de lui faire pour une grande occasion ; mais nous causerons de ces graves choses, il faut maintenant traiter de nos affaires. Je t’envoie les dernières nouvelles du bon Lanthenas qui s’est déterminé à nous attendre ; ainsi je crois qu’à notre arrivée à Paris, il faudra que l’un de nous fasse avec lui le voyage de Mortemer[3] pour décider une bonne fois s’il faut se fixer ou ne plus songer à cet objet.
On s’attend plus toujours à la guerre, et je ne sais que penser de ses suites, avec un ministère traître, des volontaires mal armés, une Assemblée médiocre et un peuple inconstant. Les prêtres sont furieux, et des gens qui ont faim prennent aisément la rage. Je pense qu’il faut garder Arnould[4] pour nous aider et nous accompagner jusqu’au dernier instant ; mais arrive demain de bonne heure, car j’ai faim de te voir et de faire avec toi nos dernières dispositions.
Tu me dis de changer en petits billets deux assignats de 50 livres ; mais tu ne m’en as laissé qu’un ; il est déjà échangé, et j’aurai sur lui quelques bagatelles à acquitter.
Ce qui me gêne gros, c’est le compte de Mme Braun que je croyais
- ↑ Ms. 6239, fol. 229-230.
- ↑ Préveraud de Pomberton, cousin de Roland, devenu major de la garde nationale de Villefranche. — Voir sa notice, lettre du 10 décembre 1784.
- ↑ L’abbaye de Mortemer, en Normandie. C’était une abbaye commandataire de Cisterciens, dont la France ecclésiastique (ann. 1786, p. 334) évalue le revenu à 8,000 livres. Lanthenas, dans une lettre à Bancal du 14 octobre 1791 (ms. 9534, fol. 263), évaluait le prix du domaine à 435,000, « qu’on pourrait aisément doubler en faisant dans la maison une éducation nationale rurale », et proposait à ses amis de faire cette acquisition en commun.
- ↑ Nous ne savons rien de ce serviteur.