Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/1230

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écrit le 23 mars[1] ; mais Vergniaud fit choisir son compatriote Duranthon (13 avril) et les Roland se rabattirent sur le projet, de lui donner Bancal comme adjoint et surveillant ; Bosc écrivait à Bancal le 13 avril : « Madame Roland vous a parlé du projet qu’on avait eu sur vous pour le ministère de la Justice. Hier, Lanthenas me sondait pour savoir si vous accepteriez la place de secrétaire général de ce ministère qui va être rempli par M. Duranthon, de Bordeaux… » (lettre inédite, coll. Beljame, déjà citée en partie par M. A. Rey, p. 24). Bancal ne paraît pas s’être soucié de cette ouverture. Quoi qu’il en soit, la nomination de Duranthon ne fortifia pas Roland et Clavière ; leur nouveau collègue marcha avec Lacoste.

L’occasion d’une revanche s’offrit bientôt ; à la suite des premiers échecs de l’armée du Nord, de Grave, que ses liens avec la cour rendaient suspect, donna sa démission (8 mai). Aussitôt Roland exigea et obtint la nomination d’un ministre de la Guerre « patriote », de son ami Joseph Servan, qui fut nommé le lendemain. Les lettres de Madame Roland à Servan, des 9 et 10 mai, révèlent assez la part prépondérante qu’elle eut dans ce choix : « Oui, Monsieur, je l’ai souhaité, voulu… ».

Quatre jours après, autre succès, moins éclatant, mais encore considérable : Clavière renouvelle, le directoire des Postes (11 mai) et y introduit des amis particuliers de Roland, Bosc, Gibert, déjà employés dans cette administration, mais en un rang subalterne[2]. Le ministère avait désormais des hommes sûrs dans un service public essentiel, et Bosc écrivait à Bancal, le 14 mai, en lui annonçant sa nomination : « Il s’agit de désaristocratiser la Poste[3]… » (coll. Beljame, lettre inédite déjà citée par A. Rey, p. 23).

À mesure que les Roland se sentent mieux maîtres du terrain, on voit s’organiser les réceptions, les dîners auxquels on convie députés et journalistes[4]. Le 13 mai, Lanthenas, qui était auprès de Roland, sans titre officiel, une sorte de secrétaire particulier, écrit à Dulaure, qui dirigeait le Thermomètre du jour : « Madame Roland réunit demain lundi quelques patriotes à dîner avec son mari. Elle invite M. Dulaure à s’y trouver et à lui procurer, ainsi qu’a son mari, le plaisir de connaître un bon citoyen, dont M. Lanthenas leur a sou-

  1. Louvet affirme (Mémoires, éd. Aulard, I, 46-49) qu’on songea aussi à lui.
  2. Voir Patriote du 15 mai 1792.
  3. Voir au Moniteur du 23 mai, la harangue des nouveaux administrateurs des Postes à l’Assemblée nationale (séance du 31 mai).
  4. Voir lettres 478 et 481 ; — cf. Mémoires, I, 279 ; — Champagneux, Disc. prélim., p. xxxiii.