Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/1478

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

particulièrement recommandé à M. Formey[1] par l’un de ses confrères, j’assistai à des séances de ce corps illustre.

Avide d’instruction et dévoué particulièrement à l’étude des Arts, j’avais pour objet d’examiner leur état dans les diverses parties de l’Europe ; le résultat de mes observations, consigné dans beaucoup de mémoires particuliers, est aussi publié en partie dans quelques ouvrages dont l’un traite de l’éducation des troupeaux et de la culture des laines. Pénétré de l’esprit qui porte l’Académie des Sciences de Paris à encourager la publication des Arts pour l’extension des connaissances et l’utilité générale, j’en ai décrit différents qui font partie de cette belle collection ; on les traduit actuellement en allemand et on les réimprime dans les États de Votre Majesté. J’ai de nouveaux cahiers au rapport de la même Académie qui, sur les premiers, m’a pris au nombre de ses correspondants ; et je traite l’immense partie des manufactures dans la nouvelle Encyclopédie par ordre des matières.

Des contrées que j’ai visitées, l’Italie, que son heureux climat, ses antiquités précieuses, ses chefs-d’œuvre dans tous les genres rendent singulièrement intéressante, me présentait les objets les plus variés et les plus propres à fixer l’attention des observateurs.

Les riches montagnes de la Suisse, les plaines fertiles de la Lombardie, Venise, originale par son gouvernement, aimable par ses mœurs ; Bologne, savante et renommée ; Florence, offrant encore les monuments de la grandeur et du goût des Médicis ; Rome inépuisable dans ses trésors ; Naples, délicieuse par sa température, imposante par son Vésuve ; la Sicile, où l’histoire naturelle, les débris de toute espèce devraient attirer plus de voyageurs ; Malte enfin, où l’espèce est si belle et la trempe excellente, furent tour à tour le théâtre de mes courses et celui de mes observations, ainsi que la culture, les productions, le commerce, les arts, les mœurs, le langage, la poésie, les spectacles, etc. et l’influence du gouvernement sur toutes ces choses.

J’ai publié ce qui m’en a paru remarquable dans six volumes de Lettres qui viennent de paraître.

Heureux si ces divers ouvrages étaient jugés par Votre Majesté estimables et utiles, je croirais alors avoir un titre pour obtenir la distinction que j’envie à cause de la main de qui seule j’aimerais à la tenir.

Dans tous les cas, ce sentiment sera mon excuse, et j’aurai goûté la satisfaction de témoigner à celui qui l’excite une admiration trop méritée pour qu’elle soit suspectée de flatterie, vice dont j’aurais honte, mais qu’il n’appartient pas à tous les Princes de faire éviter aussi sûrement dans toutes les expressions que leur élévation exige.

Puisse Votre Majesté agréer cet hommage d’un homme simple, libre et vrai, qui justifie tous ces noms en se disant avec le plus profond respect,

Sire, De Votre Majesté, etc., etc…

Pourquoi Roland n’aurait-il pas été de l’Académie de Berlin ? Le littérateur Sélis venait bien d’y être admis. Le 30 décembre 1781, Madame Roland écrivait à son mari : « Sais-tu que M. de (sic) Sélis est nouvellement admis au nombre des associés étrangers de l’Académie de Berlin par Sa Majesté prussienne, à laquelle il avait envoyé ses ouvrages ? »

Faut-il croire que Frédéric II ne trouva pas assez de Sire et de V. Majesté dans la lettre, ou bien que les titres invoqués parurent insuffisants ? Toujours est-il que Roland ne fut pas académicien de Berlin, car nulle part il n’en prend le titre.

VII. Roland avait été plus heureux auprès de la « Société économique », de Berne, avec laquelle il avait pu nouer des relations lors de ses divers voyages en Suisse (1769, 1773.

  1. Formey (1711-1797), secrétaire perpétuel de l’Académie.