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volution. Lorsque, en 1798, Bancal converti publiera un ouvrage tout imprégné de démocratie religieuse, Bosc lui écrira[1] : « J’ai lu ton livre et j’y ai reconnu ton ardent amour pour la République, mais non les principes que nous discutions jadis dans nos promenades philosophiques des dimanches ». — « Dites-moi quelque chose, écrit à Bosc Paul de Lamanon en avril 1788, de votre santé et de celle des personnes de la société promeneuse, à laquelle je me recommande… » (coll. Beljame). Cuvier raconte que ces excursions botaniques, faites en troupe, inquiétaient les paysans. Le savant et aimable historiographe de Saint-Prix, M. Auguste Rey[2], nous apprend qu’une de ces herborisations avait pour but Saint-Gralien et Saint-Prix. Bosc se familiarisait ainsi de bonne heure avec les abords de cette forêt qui devait l’abriter pendantl a Terreur.


§ 9. Les débuts de la Révolution.

C’est dans ce milieu de savants et de légistes que Bosc assista à l’explosion de 1789. Mais, alors même qu’il n’eût pas été entraîné par eux, l’impulsion des Roland aurait suffi. Toutes les lettres qu’il reçoit de Madame Roland sont pressantes, impératives, enflammées ; celles du mari (collection Morrison) respirent la même fièvre. Par eux et par Lanthenas, il se lie avec Brissot, collabore au Patriote français, et, lorsqu’il a reçu de son impétueuse amie quelqu’une de ces lettres où frémit le génie de la Révolution, il la porte au journaliste, qui l’arrange et l’insère. Tout semble d’ailleurs commun entra Lanthenas, Bancal et lui. Ils sont, comme les appelle à chaque instant Madame Roland, « le triumvirat ».

C’est à ce moment que naquit, entre eux et les Roland, un projet où se reconnaît bien l’esprit du temps, et que nous exposerons avec détail dans les Appendices réservés à Lanthenas et à Bancal. Il s’agissait d’acheter en commun quelqu’un de ces domaines ecclésiastiques que la nation venait de mettre en vente et d’y aller vivre tous ensemble dans une philosophique retraite. Ce projet d’un grand établissement, pris, abandonné et repris pendant plus d’une année, finit par tomber.

Mis en rapports par Lanthenas avec Gilbert Romme, qui venait de fonder (10 janvier 1790), avec Théroigne de Méricourt, le Club des Amis de la loi, Bosc fut un des premiers adhérents de ce groupe qui se réunissait chez Théroigne, à l’hôtel de Grenoble, rue du Bouloi. M. Marcellin Pellet[3] possède et signale une feuille d’émargement, du 10 mars, où figure son nom. Dès le 18 février (lettre 341), Madame Roland taquine son ami sur ses relations avec « l’étrangère ». Le 20 juin, le club alla célébrer l’anniversaire du serment du Jeu de paume à Versailles et la fête se termina par un dîner au Ranelagh du bois de Boulogne (voir au Patriote français du 23 juin le compte rendu de Lanthenas ; cf. Correspondance, lettre 355, et ms. 9534, fol. 237 et 241). On voit par là que Lanthenas était du groupe ; Bernard Maret également. (Marc. Pellet. loc. cit.)

C’était l’heure souriante de la Révolution. On associait dans un même culte la Liberté et

  1. De Charleston, 7 mars 1798, collection Beljame. Lettre déjà publiée en partie par M. Auguste Rey, Le naturaliste Bosc, page 54.
  2. Ibid, p. 13.
  3. Variétés révolutionnaires, troisième série, Alcan, 1890, p. 89.