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Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/943

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Cependant la municipalité avait écrit, et le lendemain de sa déclaration arrive le décret du 13 qui ordonne la continuité de la perception des droits. Alors, sans avis, sans observations, elle se hâte de faire afficher ce décret. Le peuple se croit joué, il est furieux, il s’assemble, il annonce qu’il a compté sur la déclaration faite, et qu’il ne payera plus ces droits ; mais il continue de montrer son empressement à se prêter à un remplacement. Les projets pleuvent de toute part, et, jusqu’aux plus pauvres, font des offres à leur manière ; les commissaires des sections travaillent au mode du remplacement. Durant cet intervalle, on peint à l’Assemblée la révolte du peuple de Lyon, l’embarras de sa municipalité, le malheur de ses magistrats, la nécessité d’arrêter l’insurrection, de déployer la force, etc. Nouveau décret du 19[1] (détestable sous tous les rapports). Le pouvoir exécutif est interpellé, les régiments sont en marche, le peuple désespéré s’enflamme… Qu’arrivera-t-il ? C’est ce qu’on ne peut prévoir. Mais était-ce à vous, ami de l’homme et des malheureux, d’ajouter à leur état fâcheux, fruit de l’ignorance et de l’oppression, l’amertume du blâme sans ménagement ? Ils vous regardaient comme un de leurs défenseurs, et, en vous voyant les mal juger, ils se croient trahis.

Rappelez-vous que la majeure partie du corps municipal lyonnais est ennemie de la Révolution ; sachez que l’un de ses membres, frère d’un député, passe pour avoir des intérêts communs avec le fermier des octrois ; suivez la marche de ce corps aussi ignorant peut-être et moins pur que le peuple lui-même, et voyez avec quelle discrétion l’écrivain impartial et patriote doit distribuer l’éloge et la censure.

Vous n’aurez entendu qu’une partie ; l’ami Blot lui-même aura été induit en erreur. Envoyé par la municipalité, c’est avec celui de ses membres dont le patriotisme est le plus suspect, ou, disons mieux, dont l’aristocratie est la plus connue, qu’il est plus particulièrement en relation. Avertissez-le qu’il a plus besoin que jamais de sagesse et de conséquence dans sa conduite comme homme public. Ce qu’on appelle

  1. Il y a ici une légère erreur dans la copie. Le second décret est du 17.