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Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/945

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et faire des torts dans la société du monde ou dans le détail de quelques relations, sont des qualités éminentes dans un homme public et dans les temps de révolution ; et si elles se fussent trouvées seulement dans trois ou quatre personnes de la municipalité de Lyon, cette ville et son administration se fussent régénérées ensemble.

Il n’était ni digne ni adroit à Blot de marquer tout à coup son éloignement d’un tel homme, car il avait de plus fortes raisons pour s’honorer de son estime et pour profiter de ses lumières. Sans ce froissement, très sensible immédiatement avant son départ pour Paris, il eût conservé quelque correspondance, et elle ne lui aurait pas été inutile pour ses opération mêmes ; car c’est des avis contradictoires que résulte l’indication du mieux possible.

Au reste, je ne dis rien de ceci en forme de reproches ; je suis infiniment éloignée de l’idée d’en faire, et je n’avais pas le projet de vous en entretenir en prenant la plume : je me proposais seulement de vous dire de prévenir votre ami de la disposition des esprits sur son compte, parce que je crois qu’il importe à ses intérêts, à sa satisfaction d’en être instruit.

Quant à nous personnellement, nous sommes tellement indépendants, par notre façon de voir, et des choses et des hommes, qu’il n’est rien au monde capable de nous faire dévier de la voie où nous jugeons devoir marcher. Avant que nous nous connussions, mon mari et moi, nous avions, chacun dans notre genre, subi assez d’épreuves pour n’en plus craindre aucune ; aussi, excepté de mal faire, il n’est rien au monde que je redoute. D’après quoi, vous jugerez aisément comment nous apprécions les propos et les évènement.

On nous a instruits dernièrement que, dans trois ou quatre sections aristocratiques de Lyon, on s’était permis sur le compte de notre ami les discours les plus étranges ; on le donne pour l’auteur de l’insurrection ; on veut qu’il soit pendu ; on va jusqu’à dire qu’il est complice de Trouard, fermé à Pierre-Seize. Notez que, dans les papiers de cet homme, les notes les plus calomnieuses sont dirigées contre notre ami et contre Blot, comme les deux patriotes les plus redoutables ; notez en