Et le uhlan, saisi d’horreur au milieu des massacres, se jette à genoux et prie :
Toi qui donnes la vie, toi qui la prends, — comment te reconnaître ? — Dans ces tranchées jonchées de corps mutilés, — je ne te trouve pas, Le cri déchirant de ces milliers qu’étouffe l’affreuse étreinte de la mort ne perce-t-il pas jusqu’à toi, — ou se perd-il dans l’espace glacé ? — Pour qui doit fleurir ton printemps ? — Les splendeurs de tes soleils, pour qui ? Oh ! pour qui, mon Dieu ? Je te le demande au nom de tous ceux à qui le courage et la peur ferment la bouche devant l’horreur de tes ténèbres : quelle chaleur ai-je en moi ? — Quelle vérité luit ? Ce massacre peut-il être ta volonté ? — Est-ce ta volonté ?…
D’une douleur moins lyrique, moins exaltée, plus simple, plus réfléchie, et plus proche de nous, est la suite des Feldpostbriefe du Dr Albert Klein, professeur à l’Oberrealschule de Giessen et lieutenant de la landwehr, tué le 12 février en Champagne[1]. Laissant de côté les pages les plus frappantes peut-être pour les qualités d’art et de pensée, je ne donnerai de ces lettres que deux extraits qui sont de nature à intéresser particulièrement les lecteurs français.
- ↑ La revue Die Tat, éditée par Eug. Diederichs, à Iéna, en donne de longs fragments dans son numéro de mai 1915.