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Page:Rolland - Beethoven, 3.djvu/216

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BEETHOVEN

à lui-même, avec son art,[1] il doit faire cette amère constatation que l’art est « plus court » que la vie :


« Lang ist das Leben nur, kurz die Kunst…[2] »
(Longue est seulement la oie, Vart est court…)

Cet aveu, le plus désolant qui puisse sortir de la bouche d’un artiste, il faut en mesurer la profonde douleur dans les années 1816 à 1818 de la vie de Beethoven. Qui a, plus cruellement que lui, senti que « l’art n’est que la faveur d’un instant ?[3] »

En cette année 1817, il cherche désespérément un moyen de fuir — fuir de soi. Quantité de notes se rapportent à des projets de voyages…[4] « Seuls moyens de salut » et de régénération…

« … Dich zu retten, ist kein andres Mittel als von hier… »

Mais les voyages lui sont interdits par la pénurie d’argent et par la maladie…[5]

  1. « Nur in deiner Kunst leben !… » (ibid no 100).
  2. « Cahiers de conversations, mars 1820 (cf. Walther Nohl. : Beethovens
    Konversationsheffe, erster Halbband, p. 397). Beethoven
    retourne ici, amèrement, un adage d’Hippocrate, repris par Sénèque :
    « Vita brevis, ars longua », que lui-même avait mis plusieurs fois en
    musique (cf. lettre à Nepomuk Hummel, 4 avril 1816, et canon écrit
    pour George Smart).
  3. « So ist er eines Augenblichs Gunst. »
  4. Manuscrit Fischhoff, nos 128, 131, 132, etc.
  5. Le catarrhe inflammatoire (Entzündungskatarrh, grosse Krankheit), la « grande maladie », — depuis le 15 octobre 1816 jusqu’en juin 1817, avec un court répit, au début de mars 1817.