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Page:Rolland - Beethoven, 3.djvu/239

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LE CHANT DE LA RÉSURRECTION

(… Chant pieux, dans une Symphonie dans les tonalités anciennes — Seigneur Dieu, nous te louons — alleluya…)

Je ne saurais avoir aucun doute : en ces mois d’été 1818, qui consacrent sa guérison, le cœur de Beethoven convalescent veut, comme il fera sept ans plus tard, chanter au Dieu qui a écouté sa prière sa Canzona di ringraziamento[1].

Mais ce n’est pas la solennelle prière intime de l’homme blessé, au flanc de qui couve sous la cendre d’une accalmie, en 1825, le mal mortel. En 1818, les forces vives revenues sont encore énormes ; et l’élan fougueux de gratitude qui les soulève vers le ciel, brasse puissamment, dans sa pensée, des masses épiques, des symphonies et des chœurs… « Alleluya, !… » C’est pour lui-même que Beethoven chante. Ce n’est certes pas pour son archiduc.

La pensée de la Messe vint ensuite[2]. Mais à peine Bee-

  1. Quatuor op. 132. « Canzona di ringraziamento… offerta alla divinità da un guarito. » — C’est si évidemment la même pensée que Beethoven y emploie l’écriture « in der alten Tonarten », dont il parlait dans sa note de 1818.
  2. La première lettre, je crois, où il l’exprime, n’est malheureusement pas datée ; mais Kalischer la place, dans son recueil (t. IV, p. 3, no 761), en janvier 1819 :

    « Le jour où devra être exécutée, pour les cérémonies de fête de votre Altesse Impériale, une Grande Messe (ein Hochamt) de moi, sera pour moi le plus beau jour de ma vie, et Dieu m’illuminera, afin que mes faibles forces contribuent à la glorification de ce jour solennel. »

    Nous pouvons en déterminer la date approximative, d’après la mention précise, faite dans cette lettre, de l’achèvement des deux derniers morceaux de l’op. 106, en particulier du Fugato. Ce devrait être très probablement dans l’arrière-saison de 1818, et c’est sûrement avant les derniers jours de l’année, où Beethoven fut bouleversé par un arrêt de justice, qui l’atteignait dans son orgueil (cf. lettre du