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Page:Rolland - Beethoven, 3.djvu/319

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LE CHANT DE LA RÉSURRECTION

extrême liberté. Ch. Kœchlin l’a noté, à propos du premier morceau de la sonate op. 14, no 1[1].

Mais l’écriture fuguée et la fugue sont choses fort différentes. L’une est une cpiasi-nécessité de toute pensée musicale d’Occident, un peu riche et complexe. L’autre est une forme d’esprit, très spéciale. Elle ne semblait pas naturelle à Reethoven. Comment l’est-elle devenue ?

Grâce à une grande rencontre, qui a eu sur lui, comme sur Mozart, les effets les plus profonds : celle de Jean-Sébastien Bach. Et si l’action produite a été chez Beethoven moins immédiatement bouleversante et fécondante que chez Mozart[2], elle s’est exercée, chez lui, lentement, continûment, — jusqu’aux racines.

  1. Traité de l’Harmonie, vol. II, p. 89.
  2. Deux lettres de Mozart à son père, le 10 avril 1782, et à sa sœur, le 20 avril 1782, disent que, grâce à Van Swieten, il vient d’apprendre à connaître et à jouer « toutes les œuvres de Hændel et de Sebastien Bach », — qu’il est en train de se faire une collection de fugues de Bach (aussi bien de Sébastien que d’Emmanuel et de Friedmann), — que sa fiancée Constance Weber s’est entichée des fugues — et qu’il s’est mis à en écrire. Il compose pour elle, aussitôt, le Prélude et Fugue en ut majeur pour piano (Kœchel, 394) ; il veut composer cinq autres fugues, et en offrir le recueil à Van Swieten. — En fait, il écrit, coup sur coup, la Suite en ut majeur (intitulée : « Ouverture dans le style de Hændel », Kœchel, 399), la fugue en sol mineur (K. 401), l’adaptation en quatuor de cinq fugues du « Clavecin bien tempéré » (K. 405) ; quatre adagios pour trio à cordes, devant servir de préludes à des adaptations de fugues de Bach (identifiés par G. de Sainte-Foix) ; la magnifique fugue en ut mineur, pour doux pianos (K. 426). Sans parler de la grande Messe en ut mineur, qui est le plus beau fruit du génie de Mozart, fécondé par l’esprit de J.-S. Bach (juillet 1782-mai 1783). — Dans son admirable livre sur Mozart (vol. III, p. 313 et suiv.), M. G. de