Aller au contenu

Page:Rolland - Beethoven, 3.djvu/323

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
313
LE CHANT DE LA RÉSURRECTION

trouvait aux sources de la tradition directe du grand style.

Aussi, fut-il emporté dans le flot d’enthousiasme qui souleva le monde musical d’Allemagne, aux premières années du xixe siècle, pour les vieux maîtres germaniques. En 1804, l’Allgemeine Musikalische Zeitung proclame : — « C’est maintenant le temps de la résurrection des morts ; et par bonheur, cette résurrection s’étend seulement aux justes : Sébastien Bach, Hændel, Emmanuel Bach… Il y a dix ans, ils étaient comme endormis dans le tombeau ; on en parlait bien avec estime, mais nul n’avait plus commerce avec eux. » — Peu après 1800, trois éditeurs, sans s’être donné le mot, entreprennent en même temps la publication du Clavecin bien tempéré et des autres œuvres pour clavier de J. S. Rach : Simrock, à Bonn ; Nägeli, à Zürich ; Hoffmeister et Kühnel, à Leipzig et Vienne. Beethoven ressent très vivement, au nom de son peuple allemand, la gratitude envers Jean-Sébastien et le remords du long oubli où il gisait. De là, le magnifique hommage de vénération filiale qu’il lui rend, dans une lettre du 15 (ou 25) janvier 1801 à l’éditeur Hoffmeister de Leipzig :

— « Que vous veuillez publier les œuvres de Sébastien Bach me fait du bien au cœur, — ce cœur qui bat tout entier pour le haut et grand art de cet aïeul — (le mot allemand est beaucoup plus beau : « dieses Urvaters »)[1] — de l’harmonie.

  1. Dans une autre lettre du 22 avril 1801 à Breitkopf, Beethoven appelle Bach « le Dieu immortel de l’harmonie » (… des unsterblichen Gottes der Harmonie…).