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Page:Rolland - Beethoven, 3.djvu/392

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BEETHOVEN

B E E T H 0 V E N

Q.70

u / O

Il est riche en forts contrastes : le gloria, le parc hominibus, le gratias agimus, le qui tollis, le qui sedes et le miserere, le quoniam et Vamen. Un J.-S. Bach leur consacre des morceaux détachés : chœurs, arie, duetti, et il se contente d’en rendre l’atmosphère générale, sans s’astreindre à l’exactitude littérale. Un Mozart, beaucoup moins strict encore, ne se soucie d’aucune unité de sentiment et de style, même dans sa belle Messe en ut mineur, et il fait suivre un Gloria Hændelien d’un Laudamus te dans la manière des ariosi galants de Hasse. Mais Beethoven, on le sait, trouve dans la difficulté meme un aiguillon ; et sa passion de l’unité, qui est chez lui un trait de caractère moral et musical à la fois 1, une sorte de volonté athlétique, s’acharnant à lier les éléments opposés, a décidé de rassembler en un seul Hymne tous les épisodes de chacun des grands Actes de la Messe, tout en s’attachant à exprimer rigoureusement la signification de chaque phrase, de chaque mot. Ce sera le problème, presque insurmontable, de la Messe en ré : — en Cinq Hymnes, embrasser le champ, partagé par J.-S. Bach en 24 propriétés limitrophes, que séparent des haies fleuries. Il n’y réussira pas toujours sans heurt et sans contrainte. Mais à cette contrainte l’œuvre devra ses efforts les plus 1. C’est le propre du grand symphoniste ; et W. Riezler a raison d’insister sur ce fait évident, que le problème de la symphonie est au centre de toute la création de Beethoven, même dans un genre qui, comme la Messe, est le plus opposé à l’esprit de la symphonie. Pour la première fois dans l’histoire de la musique, toutes les parties de la Messe, fragmentées par les autres compositeurs et traitées chacune à part, s’organisent, dans la Messe en ré, en un ensemble symphonique, vivant et lié, — sans que pourtant aucun détail soit sacrifié.