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Page:Rolland - Beethoven, 3.djvu/399

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LE CHANT DE LA RÉSURRECTION

nuancée, de l’orchestre. Un court prélude larghetto des clarinettes, des bassons et des cors, ouvre la scène ; les flûtes essaient ensuite et dictent, les premières, la plaintive mélodie du Qui tollis, que vont reprendre les voix, auxquelles se joindront discrètement les cordes. La phrase, dont la belle ligne élégiaque est constamment secouée par des sanglots, ne cesse point de moduler A Et cette instabilité de la tonalité répond sans doute au sens toujours plus affiné, chez le vieux Beethoven, de la fluidité du coloris, des harmonies — (ceux qui lui reprochent sa surdité sont les vrais sourds !) — mais surtout elle accuse l’inquiétude de l’âme, qui est la marque de cette Messe, quand la volonté de foi et d’espoir ne la dompte point. C’est là, sans doute, ce qui blesse ou irrite sourdement nombre d’auditeurs dévots, qui jugent ces accents déplacés dans l’office divin. Et il est certain que l’admirable Qui tollis de J.-S. Bach ne les a point admis : la tristesse pieuse qui dit, chez lui, son mea culpct et son Miserere, chemine sans inquiétude, d’un pas égal et sur, solidement tenue par la main ferme d’un guide 1 2. Mais 1. Du fa majeur au ré mineur, à l’ut mineur, au si bémol majeur, au sol mineur, au ré mineur, au ré majeur, au si mineur, au la mineur, au ré majeur, au si mineur, au sol mineur, à l’ut mineur, au si bémol majeur, au fa majeur, au ré bémol majeur, au fa dicze mineur, au sol majeur, au ré majeur, au soi mineur, au fa majeur, au fa dièze mineur, a 1 ut dicze majeur... Vingt-trois mutations de tonalité, eu un espace aussi bref !

2. La même main du Maître tient puissamment la main plus nerveuse du magnifique « Qui tollis » de la Messe en ut mineur de Mozart, qui, sans son tuteur biblique (selon Hændel), par moments trébucherait.

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