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Page:Rolland - Beethoven, 3.djvu/623

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LE CHANT DE LA RÉSURRECTION

En vérité, Beethoven a joui d’une immunité, comme

— en dépit de maints déboires moraux et pécuniaires

— d’une gloire vivante exceptionnelle. Il allait en recevoir, à l’occasion de la Neuvième Symphonie, des témoignages émouvants ; et quand il mourut, ses funérailles furent une explosion de deuil populaire, dont la grandeur et la spontanéité n’avaient pas eu de précédent, en pays allemands. Mais dès 1820, il pouvait respirer autour de lui l’odeur d’immortalité 1. Il s’entend dire (par Czerny ?) qu’ « il est le plus grand homme de VEurope » 1 2. On émet, devant lui, le regret qu’il ne soit pas « duc ou prince » 3. Il est vrai qu’il se croit — et qu’on le croit — bien au-dessus de ces titres. Un dictionnaire biographique n’a-t-il pas imprimé, de son vivant, qu’il était un fils naturel du grand Frédéric ? 4... 1. On l’appelait un « Shakespeare musical » (Wendt, cité par Schindler ).

Dans son journal intime (Manuscrit Fischhoff), en 1816, il recopie orgueilleusement cette citation d’un livre ou d’un article français : « Malheureusement les génies médiocres sont condamnés à imiter les défauts des grands maîtres, sans en apprécier les beautés : de là le mal que Michel-Ange a fait à la peinture, Shakespeare à l’art dramatique, et que Beethoven fait de nos fours à la musique. » 2. « Begreiflich dass Sie der grôsste Mann in Europa sind » (p. 385, février 1820).

— « Vous avez déjà assez de gloire » (Sic haben Ruhm genug), lui dit un autre ami (p. 395, mars 1820). — Il aurait pu répondre, comme Corneille : « Je suis saoul de gloire, et affamé d’argent. » 3. P. 431, mars 1820.

4. Peters dit :

— « Il paraîtrait que, dans le Conversations Lexikon, vous êtes un