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Page:Rolland - Beethoven, 3.djvu/73

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LE CHANT DE LA RÉSURRECTION

volonté supérieure commande à ces vicissitudes, que la volonté intelligente et — (oui, malgré tout !) — bienfaisante d’une Providence veille sur nous.

— « Je veux donc patiemment me soumettre à toutes les vicissitudes et placer mon entière confiance uniquement en ton immuable bonté, ô Dieu ! Tienne, immuablement tienne doit se réjouir d’être mon âme. Sois mon rocher, ô Dieu, sois ma lumière, sois éternellement mon assurance ![1] »

— « … O Gott über alles !… »

Nous ferons, quelque jour, l’analyse de ce Dieu, — puisqu aussi bien ce : Ueber alles ! » est le : « Ueber ich » de Beethoven, son Sur-moi, son « Doppelgänger », son Double, son vœu, sa volonté, son idéal trouble et puissant.

Cet idéal a évolué, au cours des ans. Beethoven n’a cessé de faire effort pour dégager du sable des jours le roc de l’éternité. Nous le verrons lire Platon, les Upanishads et la Gîta. Après s’être baigné dans leur rêve immense, le rêve s’avérera insuffisant à le soutenir, aux jours de détresse. Il aura besoin d’un Dieu personnel, et il en projettera la lumière aveuglante ou l’ombre gigantesque dans cette Chapelle Sixtine, qu’est sa Missa Solemnis. Mais à mesure qu’il avance dans cette Messe, qui accuse bien des troubles et des combats, sa foi voulue trahira son incertitude inquiète ; et il en sortira insatisfait. Il cherchera son Dieu sur la voie de la communion avec l’humanité, dans le grand rêve cosmique et social, qui couronne la Symphonie de l’Ode à la Joie. Et ce ne sera point la dermere étape. Il continuera à

  1. 1818. Sur un cahier d’esquisses préparatoires à la sonate op. 106.