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Page:Rolland - Beethoven, 3.djvu/91

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LE CHANT DE LA RÉSURRECTION

was Leben heisst…) est sacrifié à la défense de l’enfant contre les assauts de la mère enragée (non sans raison), qui le diffame et qui soudoie les domestiques, — aux préoccupations de la santé, de l’éducation, de l’avenir du bambino de neuf à dix ans…[1] Pour le Très-Haut » (der Erhabenen…), pour l’art sacré, il ne reste plus rien.

« À partir de ce moment, écrit Fanny Giannatasio del Rio (la fille du directeur de l’école où Beethoven a mis l’enfant en pension)[2], un nouvel état d’âme se fit jour en Beethoven (nun brach ein neues Gemüthsleben bei B. hervor…) ; il parut vouloir se vouer, corps et âme, au petit ; et qu’il fût joyeux ou triste, à son sujet, il n’écrivit plus, ou il ne put plus écrire » (…schrieb er oder konnte er nichts schreiben).

Toute la passion dont il n’a pu trouver l’emploi, il la reporte sur cet enfant. Ce garçonnet remplit sa vie. Il s’enorgueillit de lui, il en glousse, comme s’il l’avait pondu :

— « Et moi aussi, je suis père ! » écrit-il à son vieil ami de Bonn, Wegeler[3].

Et à Antonia Brentano, le même jour, naïvement :

— « Vous savez que je suis devenu père, et que j’ai de vrais soucis de père[4] ».

  1. Le petit Karl était né, le 4 septembre 1806.
  2. C’est le 24 janvier 1816 que Beethoven fait sa première visite, avec le neveu, à l’Institut Giannatasio ; et l’extrait cité du journal de Fanny se rapporte aux premières rencontres.
  3. « Du bist Mann, Vater, ich auch, doch ohne Frau » (29 septembre 1816).
  4. « Sie werden wissen, wie ich Vater geworden bin und wahre Vatersorgen habe… »