Aller au contenu

Page:Rolland - Beethoven, 3.djvu/92

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
86
BEETHOVEN

Il le répète à tous ses amis. Il se le répète, dans son Journal. « Rien ne compte plus pour lui, dans la vie, que son enfant[1]. » Il ne peut plus se contenter de le savoir, à quelques pas de lui, dans une bonne et affectueuse pension, où il est choyé par une famille qui a le culte de Beethoven, et dont une des jeunes filles brûle pour lui d’amour chaste et passionné…

— « Qu’est-ce qu’une pension, auprès de la sollicitude attentive d’un père pour son enfant — car je le considère comme tel, maintenant, et je ne cesse de penser (… und sinne hin und her…) comment je pourrais avoir plus près de moi ce cher trésor (dieses mir theure Kleinod), afin d’agir sur lui, d’une façon plus prompte et plus avantageuse. — Mais que c’est donc difficile pour moi ![2] ».

Que ce lui soit difficile, on peut l’imaginer. Il lui faut réformer toute sa vie, — et le dehors et le dedans. Pour cet enfant, il lui faudra renoncer à ses habitudes de vieux bohème, s’organiser une vie bourgeoise, se bâtir un foyer. Et comment le saurait-il ?…

— « Il est plus difficile pour moi que pour quiconque de tenir une maison (einrichten eine Haushaltung), car je n’y entends absolument rien. Je serai toujours exposé à me tromper[3] ».

Il a beau demander conseil aux rares amis qui ont la compétence et la patience de l’y aider, à Zmeskall, à

  1. « Auf sein Leben, äusserte er, halte er nichts, nur wegen seines Neffen ». (Fanny).
  2. 15 mai 1816, à la comtesse Erdödy.
  3. Lettre à Zmeskall, édit. Kalischer, no 577, p. 94.