vement : il réserve à son oncle les plus cruelles déceptions[1].
Bien avant que Beethoven en boive l’amertume, que de fatigues, que de soucis, d’agitations lui cause cette tutelle ! Il était déjà dans un état de santé précaire, qui ne supporte pas une pareille tension. Il tombe malade. Et ce sera la porte ouverte à une succession de graves maux, qui ne le lâcheront plus, jusqu’à la fin. Ils s’annoncent, dès le printemps 1816. Dans sa lettre du 15 mai à la comtesse Erdödy, où il se montre si préoccupé de son « cher trésor », il dit que « depuis six semaines, sa santé est sur un pied chancelant : il pense souvent à la mort, certes, ajoute-t-il,
- ↑ Le 5 décembre 1818, le petit Karl s’enfuit de chez scn oncle, qui
accourt, éperdu, chez les Giannatasio, pour chercher aide et appui. —
« Jamais de ma vie, écrit Fanny, je n’oublierai le moment, quand il est
venu et qu’il a dit que Karl était parti, qu’il s’était enfui chez sa mère, et
quand il nous a montré sa lettre, pour preuve de sa « Niedrigkeit »… Voir
cet homme ainsi souffrir, pleurer, c’était poignant !… (Diesen Mann so
leiden, weinen zu sehen, es war sehr angreifend !…) Il criait, en pleurant :
— « Il a honte de moi !… » (Er schàmt sich meiner !) Il racontait que
son cœur avait battu, toute la nuit… On aurait pu l’entendre… »
Le petit fut ramené par la police, chez Beethoven. Mais les pires ennuis commencèrent, avec un procès très pénible et blessant, que la veuve intenta, assistée par deux témoins, dont l’un, le curé de Môdling, était enragé contre Beethoven, et l’accusa de pervertir le jeune garçon, de l’inciter à injurier sa mère, à négliger ses devoirs religieux. Beethoven répondit sur le même ton : il accusa le curé d’être décrié, de fustiger ses écoliers avec « bestialité » ; il lui avait violemment interdit de porter la main sur son neveu… Le tribunal rendit, le 18 décembre 1818, un arrêt offensant pour Beethoven, qui en appela au K. K. Appellationsgericht. Baison lui fut donnée seulement le 10 janvier 1820. Durant ce long délai, son esprit ne put trouver de tranquillité.
