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BEETHOVEN

entre eux sur tant de points, s’entendent pour admirer chez Beethoven le respect de l’antique forme de la cadence unitaire, tout en vivifiant la fugue par la dramatisation et la libre logique du développement expressif.

Je me bornerai à retracer, comme je la vois, la ligne de ce développement : car s’il peut être intéressant de relever, pour l’homme du métier, la marche du dux et du cornes, les développements et le jeu des rouages du mécanisme, — il l’est, pour le moins, autant, sinon beaucoup plus, pour ceux qui écoutent avec leur cœur intelligent, de discerner l’âme qui mène ce jeu et qui l’empreint de ses passions, de sa volonté, de sa puissante personnalité. Est-ce au hasard qu’il forge ces motifs ou qu’il les reçoit tout armés ? Et s’il les orne, ou les prolonge, d’une demi-douzaine de Variations, n’en a-t-il pas fait un choix réfléchi, parmi quelques douzaines d’autres variations ébauchées, ayant presque toutes leurs intérêt ou


    au livre de la Fugue, p. 96, — et passim, chap. sur la Grande Variation amplificatrice et le quatuor).)

    Riemann, dans son petit livre sur « Beethovens Streichquartette », et dans l’édition qu’il a revue de la Vie de Beethoven, par Thayer.

    Pour Vincent d’Indy, l’œuvre est une double fugue, ou une fugue à deux sujets, dont chacun des deux, à son tour, devient contre-sujet de l’autre ; et chaque fugue a trois variations ; en suite de quoi s’opèrent la Durchführung (ou Développement) des deux fugues, en trois parties, la Réexposition en Reprise, et la Péroraison.

    Riemann apporte une insistance particulière à affirmer que cette fugue, à vrai dire de dimensions colossales, ne s’écarte pas sensiblement de la fugue d’école, telles que l’avaient mise en code les maîtres de composition après J. S. Bach, et que ses libertés ne passent pas en hardiesses celles, souvent, de Kirnberger, de Marpurg ; et, renchérissant sur cette affirmation, il montre que de telles libertés abondaient, non seulement dans le Clavecin bien tempéré, mais dans les anciens Ricercari, autour de 1600. Beethoven reste donc fidèle au caractère essentiel de la fugue.