Page:Rolland - Beethoven, 5.djvu/221

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
205
LES DERNIERS QUATUORS

leur beauté, leur droit à vivre ? Quelle raison secrète de l’instinct ou de l’idée a donc guidé son choix ? À quelle logique du sentiment obéit l’esprit, en le contrôlant ? C’est notre rôle de le chercher. La critique est incomplète, si elle s’arrête à la lettre du texte. Il faut tâcher d’en lire le sens. Avec une personnalité aussi entière, aussi véridique que Beethoven, qui ne tient à rien tant qu’à parler vrai, à inscrire la forme la plus exacte et la plus pleine où puisse tenir sa pensée, — (« Ce que j’ai dans l’esprit, il faut que cela sorte ! ») — on n’a pas beaucoup de peine à entrer dans la maison : la clef est sur la porte, quand celle-ci n’est pas grande ouverte.


Le premier violon vient de répéter, craintivement, en chuchotant, le fameux thème du Souci, et il s’arrête, sur un la suspensif, qui est comme un point d’interrogation et d’attente :

[partition à transcrire]

Silence… Et soudainement, qui répond ? Au premier violon, l’impétueux élan de l’héroïsme. Le thème du Souci est retombé, en contre-sujet, à l’alto ; et il a beau élever la voix, pour se faire entendre ; le fougueux thème, qui s’empare peu à peu des autres voix, le violente et le balaye. Aux bondissements des dixièmes et des douzièmes (qui rappellent ceux de la grande sonate op. 106), succède un ruissellement en triolets, qui le submergent ; il en ressort, par souffles entrecoupés, comme un nageur qui se débat ; mais on le