Page:Rolland - Colas Breugnon.djvu/113

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des temps. Tous nos messieurs se lamentaient de la misère, de la cherté, du peu d’affaires, de la ruine de notre France, de notre race en décadence, des gouvernants, des intrigants. Mais prudemment. Ils ne nommaient aucun des gens. Les grands ont des oreilles grandes comme eux ; on ne sait pas si l’on n’en va pas à tout moment voir passer un bout sous la porte. Pourtant, la Vérité, en bonne Bourguignonne, étant au fond du muid, nos amis se risquèrent peu à peu de crier contre ceux de nos maîtres qui étaient le plus loin. Surtout, ils s’accordèrent contre les Italiens, Conchine[7], la vermine que la grosse dondon de Florence, la reine, apporta dans ses jupons. Si vous trouvez deux chiens qui rongent votre rôt, dont l’un est étranger, dont le second est vôtre, vous chassez celui-ci, mais vous assommez l’autre. Par esprit de justice, par contradiction, je dis qu’il ne fallait châtier un seul chien, mais tous les deux, qu’à ouïr les gens, il eût semblé qu’il ne fût de mal en France qu’italien, que grâce à Dieu nous ne manquions ni d’autres maux, ni de coquins. À quoi tous, d’une seule voix, répondirent qu’un coquin italien en vaut trois et que trois Italiens honnêtes ne valent point le tiers d’un honnête François. Je répliquai qu’ici ou là, où sont les hommes, ce sont les mêmes animaux, et qu’une bête en vaut une autre, qu’un bon homme, d’où qu’il soit, est bon à voir et à avoir ; et quand je l’ai, je l’aime bien, même italien. Là-dessus, ils me tombè