Page:Rolland - Colas Breugnon.djvu/72

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oui ou non ? Si tu l’es (et tu l’es), c’est pour que tu nous serves.

Et Chamaille :

— Faquins ! Je sers Dieu, non pas vous…

Ce fut un beau tapage. Chamaille, pour en finir, plaqua l’huis au visage de ses administrés ; au travers de la grille, on vit encore ses deux mains s’agiter, dont l’une par habitude répandait sur son peuple onctueusement la pluie de la bénédiction et dont l’autre levait sur la terre le tonnerre de la malédiction. Une dernière fois, à la fenêtre de la maison, parut son ventre rond et sa face carrée, qui, ne pouvant se faire entendre au milieu des huées, répliqua rageusement avec un pied de nez. Là-dessus, volets clos et visage de bois. Les crieurs se lassèrent ; la place se vida ; et, nous glissant derrière les badauds clairsemés, nous pûmes enfin à l’huis de Chamaille frapper.

Nous frappâmes longtemps. L’animal entêté ne voulait pas ouvrir.

— Hé ! monsieur le curé !…

Nous avions beau héler (nous déguisions nos voix, afin de nous amuser) :

— Maître Chamaille, êtes-vous là ?

— Au diable ! Je n’y suis pas.

Et comme nous insistions :

— Voulez-vous lever le camp ! Si vous ne laissez ma porte, je vais, bougres de chiens, vous baptiser de belle sorte !

Il faillit sur nos dos verser son pot à eau. Nous criâmes :