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Il ne savait pas qu’il reste aux peuples raisonneurs une vertu, qui les sauve : — l’inconséquence.

Les politiciens français ne s’en faisaient pas faute. Leur despotisme se tempérait d’anarchisme ; ils oscillaient sans cesse de l’un à l’autre pôle. S’ils s’appuyaient à gauche sur les fanatiques de la pensée, à droite ils s’appuyaient sur les anarchistes de la pensée. On voyait avec eux toute une tourbe de socialistes dilettantes, de petits arrivistes, qui s’étaient bien gardés de prendre part au combat, avant qu’il fût gagné, mais qui suivaient à la trace l’armée de la Libre Pensée, et, après chacune de ses victoires, s’abattaient sur les dépouilles des vaincus. Ce n’était pas pour la raison que travaillaient les champions de la raison… Sic vos non vobis… C’était pour ces petits bourgeois cosmopolites, qui piétinaient joyeusement les traditions du pays, et qui n’entendaient pas détruire une foi pour en installer une autre à la place, mais pour s’installer eux-mêmes, et n’être gênés par rien.

Christophe retrouva là Lucien Lévy-Cœur. Il ne

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