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Page:Rolland - Jean-Christophe, tome 7.djvu/60

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JEAN-CHRISTOPHE À PARIS

d’ennui. Et Christophe, maintenant, éprouvait du respect pour ceux qui avaient été les artisans du relèvement national ; il ne songeait plus à les chicaner sur les étroitesses de leur esthétique, voire sur leur manque de génie. Ils avaient créé bien plus qu’une œuvre : un peuple musicien. Entre tous les grands ouvriers, qui avaient forgé la nouvelle musique française, une figure lui était surtout chère : celle de César Franck, qui, mort avant de voir la victoire qu’il avait préparée, avait, comme le vieux Schütz, gardé intacts en lui, pendant les années les plus sombres de l’art français, le trésor de sa foi et le génie de sa race. Apparition émouvante : au milieu de Paris jouisseur, ce maître angélique, ce saint de la musique, conservant dans une vie de gêne, de labeur dédaigné, l’inaltérable sérénité de son âme patiente, dont le sourire résigné éclairait la musique pleine de bonté.