Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 1.djvu/191

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’une seconde mère et d’une sœur un peu plus âgée, qui déjà ne demandaient qu’à la diriger. Car les dames Brissot, qui étaient bonnes observatrices, jugeaient Annette vraiment bien sympathique, tout à fait distinguée, douce, polie, réservée, timide, (de leur point de vue, ce n’était pas un mal), un peu froide, (c’était presque une vertu).

Ce fut donc avec l’adhésion de toute la famille, préalablement consultée, que Roger fit sa cour. Il ne lui cachait rien, sûr qu’il en serait toujours approuvé. Ce grand garçon était idolâtré des siens. Il le leur rendait bien. Dans la famille Brissot, on pratiquait l’admiration mutuelle. Il y avait une hiérarchie ; mais chacun avait son prix. Il fallait reconnaître qu’ils étaient tous assez bien partagés, du côté de l’esprit, comme des avantages du corps et de la fortune. Ils le reconnaissaient, mais de bonne grâce, en gens bien élevés. Ils ne le manifestaient point à ceux que, notoirement, ils jugeaient inférieurs. Mais il n’y avait aucun moyen d’en douter, à la douce certitude qui se lisait sur leurs traits. De toutes leurs certitudes, Roger était la plus certaine. Il était leur orgueil le plus tendre, et peut-être le plus justifié. L’arbre Brissot n’avait jamais porté de fruit plus réussi. Roger avait les meilleurs dons de sa race ; et s’il en avait aussi les défauts, ils