Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 4.djvu/23

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Il n’avait plus l’avenir, pour perdre de vue le passé. De ce qu’il avait saisi, il n’atténuait rien ; et il gardait, brûlante, l’image de l’horreur que son premier aspect avait imprimée sur les traits de l’ami. Il l’y ressaisissait encore, par éclairs. Au milieu d’un entretien, passait sur le visage animé de Franz, une ombre, un froncement du nez et du sourcil : c’était assez ! Le regard aiguisé de Germain avait lu sous le voile de chair : Franz sentait la mort, et il s’en écartait. Ensuite, il réagissait. Trop tard ! Il ne pouvait vaincre son aversion, devant la fosse.

Germain disait amèrement à Annette :

— Il est sain. Il a raison.

Peu à peu cependant, l’illusion acheva de boucher les trous dans sa toile d’araignée. Franz réussit à ne plus voir sur la face du malade le pouce qui modèle le visage des mourants. Il finit par oublier l’heure imminente. Il ne vit plus que l’ami de jadis, qu’il aimait. Germain se ranimait, d’ailleurs, en sa présence ; ses lèvres étaient plus rouges, comme s’il eût, en cachette, usé d’un fard. Annette lui en fit la remarque, en plaisantant. Il lui dit :

— Vous pensez rire ? Eh bien, c’est vrai. Je