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Page:Rolland Clerambault.djvu/167

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les premières lignes, écarté cette lecture importune. Ils pensaient :

— Le pauvre homme ! Son malheur est en train de lui troubler la tête.

Bon prétexte pour ne pas risquer de compromettre l’équilibre de la leur.

Un second article suivit. Clerambault y prenait congé du vieux fétiche sanglant : la Patrie. Ou plutôt, il opposait au grand carnassier auquel se livrent en pâture les pauvres hommes de ce temps, à la Louve Romaine, l’auguste Mère de tout ce qui respire : la Patrie universelle :

A Celle qu’on a aimée

Nulle douleur plus amène que de se séparer de celle qu’on a aimée. En l’arrachant de mon cœur, c’est mon cœur que j’arrache. La chère, la bonne, la belle, — si du moins on avait l’aveugle privilège de ces amants passionnés qui peuvent oublier tout, tout l’amour, tout le beau et le bon d’autrefois, pour ne plus voir que le mal qu’elle vous fait aujourd’hui et ce qu’elle est devenue ! Mais je ne sais pas, je ne sais pas oublier : je te verrai toujours comme je t’ai aimée, quand je croyais en toi, quand tu étais mon guide et ma meilleure amie, — Patrie ! Pourquoi m’as-tu laissé ? Pourquoi nous as-tu trahis ? Encore si j’étais seul à souffrir, je cacherais la triste découverte sous ma tendresse passée. Mais je vois tes victimes, ces peuples, ces jeunes hommes crédules et épris (je reconnais en eux