Page:Rolland Clerambault.djvu/172

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Le même silence parut engloutir ce nouveau cri. Clerambault vivait en dehors des milieux populaires, où ne lui eût point manqué la chaude sympathie des cœurs simples et sains. D’un écho éveillé par sa pensée, il ne percevait rien.

Mais quoiqu’il se vit seul, il savait qu’il ne l’était point. Deux sentiments extrêmes, qui paraissaient contraires, — sa modestie et sa foi, — s’unissaient pour lui dire : « Ce que tu penses, d’autres le pensent. Ta vérité est trop grande, et tu es trop petit, pour qu’elle n’existe qu’en toi. Ce que tu as pu voir, avec tes mauvais yeux, d’autres yeux en reçoivent, comme toi, la lumière. En ce moment la Grande-Ourse s’incline à l’horizon. De milliers de regards la contemplent peut-être. Tu ne vois pas les regards. Mais la flamme lointaine les marie à tes yeux. »

La solitude de l’esprit n’est qu’une illusion. Amèrement douloureuse, mais sans réalité profonde. Nous appartenons tous, même les plus indépendants, à une famille morale. Cette communauté d’esprits n’est pas