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Page:Rolland Clerambault.djvu/217

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lant à écraser toute tentative de pensée libre, avait jugé sans danger ces hommes sages, tranquilles, hommes d’études avant tout, qui ne cherchaient pas l’éclat et se contentaient de discussions privées ; il avait cru plus politique, tout en les surveillant, de les enfermer entre quatre murs. Il se trompait dans ses calculs. La vérité modestement, laborieusement trouvée, ne fût-elle d’abord connue que de cinq ou six, ne peut plus être déracinée ; elle monte de terre avec une force irrésistible. Clerambault apprit, pour la première fois, l’existence de ces chercheurs passionnés de vérité, qui rappelaient ceux des temps de l’Affaire Dreyfus ; leur apostolat à huis clos prenait, dans l’oppression générale, je ne sais quelle apparence de petite société chrétienne des Catacombes. Grâce à eux, il découvrit, à côté des injustices, les mensonges de la « Grande Guerre ». Il en avait jusque-là un faible pressentiment. Mais il ne soupçonnait pas à quel point l’histoire qui nous touche de plus près avait été falsifiée. Il en fut suffoqué. Même à ses heures de plus sévère examen, sa naïveté n’avait jamais imaginé les trompeuses assises sur lesquelles repose une croisade du Droit. Et comme il n’était pas homme à garder pour lui sa découverte, il la cria dans des articles que la censure interdit, puis sous forme satirique, ironique, symbolique, dans de petits récits, des apologues Voltairiens qui passaient quelquefois, par l’inattention du censeur, et qui désignèrent Clerambault au pouvoir comme un homme décidément dangereux.

Ceux qui croyaient le connaître se trouvaient bien