Page:Rolland Clerambault.djvu/230

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qui ne pue pas comme moi et ma race, je le tue. Ruches d’hommes, chacune a votre odeur de race, de religion, de morale, de coutumes rituelles. Elle imprègne vos corps, votre cire, votre couvain. Elle enduit votre vie, de la naissance à la mort. Malheur à qui se lave !

« Qui veut humer le relent de cette pensée d’essaims, cette sueur des nuits hallucinées d’un peuple, qu’il regarde à distance les rites et les croyances dans les lointains de l’histoire ! Qu’il aille demander au narquois Hérodote de tourner devant lui le film de la divagation humaine, ce long panorama de coutumes sociales, ignobles ou ridicules, mais toujours vénérées, des Scythes, des Issédons, des Gètes, des Nasamons, des Gindares, des Sauromates, des Lydiens, des Lybiens, et des Égyptiens, des bipèdes de tout cuir, de l’Orient au Couchant et du Nord au Midi. Le Grand Roi, esprit fort, par jeu invite les Grecs qui brûlent leurs morts à les manger, et les Hindous qui les mangent à les brûler ; et il rit de leur indignation. Mais le sage Hérodote, qui ôte son bonnet, tout en souriant derrière la coiffe, se défend de les juger et blâme qui les raille, car « si l’on proposait à tous les hommes de faire un choix parmi les meilleures lois des divers pays, chacun se déciderait pour celles de sa patrie : tant il est vrai que chacun est persuadé qu’il n’en est point de plus belles ! Aussi, rien de plus vrai que le mot de Pindare : La coutume est la reine de tous les hommes… »

« Chacun boit à son auge. Mais au moins devrait-il supporter que les autres boivent à la leur. Point ! Pour