Page:Rolland Clerambault.djvu/235

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douloureuse de la vie, — et la voie des Illusions religieuses, qui jettent le voile d’un mensonge éclatant sur le crime et la douleur : le peuple qui dévore les autres est le Peuple Élu ; il travaille pour Dieu ; le poids des iniquités, qui enfonce un des plateaux de la vie, trouve son contrepoids dans l’au-delà des rêves, où sont pansées les blessures et les peines. Les formes de cet au-delà varient, de peuple à peuple et d’époque à époque. Et leurs variations sont appelées Progrès. Mais c’est toujours le même besoin d’illusion. Il faut bourrer la gueule à cette terrible Conscience, qui voit, qui voit, et qui demande compte de l’injuste loi ! Si on ne lui trouve un aliment à broyer, une foi, elle hurle de faim et d’effroi. — Croire !… Croire, ou mourir ! — Et c’est pourquoi ils se sont mis en troupeau. Pour s’affermir. Pour faire de leurs doutes individuels une commune certitude.

« Que venons-nous donc faire avec la vérité ? La vérité, elle est pour eux l’ennemi. — Mais ils ne se l’avouent pas. D’une entente tacite, ils appellent vérité l’amalgame écœurant de peu de vérité et de beaucoup de mensonge. Le peu de vérité sert à maquiller le mensonge. Mensonge et servitude : servitude éternelle… Ce ne sont pas les monuments de la foi et de l’amour qui sont les plus durables. Ceux de la servitude le sont bien davantage. Reims et le Parthénon tombent en ruines. Mais les Pyramides d’Égypte défient les siècles. Autour d’elles, le Désert, ses mirages et ses sables mouvants… Quand je pense aux milliers d’indépendants, que l’esprit de servitude a engloutis,