Page:Rolland Clerambault.djvu/284

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des cœurs opprimés frissonnèrent d’espoir. Et dans chaque pays, plus d’un prépara sa cognée. Quant aux classes dirigeantes, d’un bout de l’Europe à l’autre, dans les deux camps ennemis, elles se hérissèrent contre le danger commun. Il n’était pas besoin de négociations entre elles pour s’entendre là-dessus. Leur instinct avait parlé. La presse des bourgeoisies ennemies de l’Allemagne donnait tacitement carte blanche au Kaiser, pour étrangler la Liberté russe, qui menaçait l’injustice sociale, dont toutes également vivaient. Dans l’absurdité de leur haine, elles cachaient mal leur joie de voir le militarisme prussien — le monstre qui devait ensuite se retourner contre elles — les venger de ces grands révoltés. Et naturellement, elles attisaient ainsi, dans les masses qui souffraient et chez le petit nombre d’esprits indépendants, l’admiration pour ceux qui tenaient tête à l’univers, — pour les Excommuniés.

La chaudière bouillait. Pour l’arrêter, les gouvernements d’Europe l’avaient hermétiquement bouchée et s’asseyaient dessus. La stupide bourgeoisie dirigeante, en entretenant le feu, s’étonnait des grondements sinistrés. Elle attribuait la révolte des Éléments au mauvais esprit de quelques francs parleurs, à de mystérieuses intrigues, à l’or de l’ennemi, aux pacifistes. Et elle ne voyait point — ce qu’un enfant aurait vu — que la première chose à faire pour empêcher l’explosion était d’éteindre le feu. Le dieu de tous les pouvoirs, quelle que fût leur étiquette, empires ou républiques, était le poing, la Force, gantée, masquée