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Page:Rolland Clerambault.djvu/322

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en lui donnant raison, il ne modifierait rien à sa façon d’agir. En désespoir de cause, elle lui cédait la place et s’en allait déverser sa rancœur dans le sein de son frère. Léo Camus ne s’embarrassait pas de ménagements. Il l’engageait à divorcer. Il lui en faisait un devoir. C’était trop demander. La répugnance traditionnelle au divorce, réveillant en cette honnête bourgeoise sa fidélité profonde, lui faisait trouver le remède pire que le mal. Les deux époux restaient ensemble ; mais leur intimité était perdue.

Rosine était presque toujours absente : pour oublier sa peine, elle préparait un examen d’infirmière, et une partie de ses journées se passait hors de la maison. Même quand elle y était, sa pensée n’y était point. Clerambault n’avait pas repris sa place d’autrefois dans le cœur de sa fille ; un autre l’occupait : Daniel. Elle répondait froidement aux avances affectueuses de son père : c’était une façon de le punir d’avoir causé sans le vouloir l’éloignement de l’ami. Elle s’en rendait compte, et elle était trop juste pour ne pas se le reprocher ; mais elle n’y changeait rien : l’injustice soulage.

Daniel n’oubliait pas plus qu’il n’était oublié. Il n’était pas fier de sa conduite ; et, pour s’en atténuer le remords, il en attribuait la responsabilité à son entourage, dont l’opinion tyrannique avait fait pression sur lui. Il n’en était pas plus satisfait.

Le hasard vint au secours des deux boudeurs amoureux. Blessé assez sérieusement, bien que sans danger, Daniel fut ramené à Paris. Pendant sa conva-