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Page:Rolland Clerambault.djvu/357

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d’excellentes gens, la condamnation de Dreyfus, ou le torpillage du Lusitania, reste le Crime du siècle. Et les excellentes gens ne voient pas que le crime pave la route de la société, et qu’ils marchent dessus, sans qu’ils s’en doutent : car ils bénéficient d’injustices inconnues, et ils ne font rien pour les empêcher. De toutes ces injustices, quelles sont les plus affreuses, de celles qui retentissent, en longs et profonds échos dans la conscience du monde, ou de celles que connaît seule la victime étouffée ?… Mais nos excellentes gens n’ont pas les bras assez larges pour embrasser toutes les misères. Qui trop embrasse, mal étreint. Ils n’en embrassent qu’une, mais ils l’étreignent bien. Et quand ils ont fait choix d’un crime pour le haïr, il absorbe toute la force de haine qui est dans leurs viscères ; le chien ronge son os : garde-toi d’y toucher !

Clerambault y avait touché. S’il était mordu, il ne pouvait pas se plaindre. Il ne se plaignait pas. Les hommes ont raison de combattre l’injustice qu’ils voient. Et ce n’est pas leur faute s’ils ne voient que son gros orteil. Gulliver à Brobdignac. Chacun fait ce qu’il peut.

Ils mordaient.